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La perluète
22 janvier 2015

Soir d'hiver

DSC06612

 

L’âtre

cet ogre débonnaire

mâchouille

gueule ouverte

les os secs de l’hiver

 

Rongée vive la nuit

postillonne

éclatant sous la dent d’un soleil

au sourire innocent

 

le ronronnement sourd de la bête en éveil

fascine le voyeur

blotti dans son fauteuil

en marge d’un festin au fumet généreux

 

une ronde chaleur

l’abrite sous son aile 

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Commentaires
A
Je suis ravie et flattée Pussicat et Joël de vous compter parmi les voyeurs réunis dans la chaleur de mon âtre. Votre amitié me tient au moins aussi chaud que "l'ogre" lui-même ;-) <br /> <br /> Tu as raison Pussy, le feu c'est un peu ma télé, celle dont je gère moi-même les images et le déroulement de l'action.<br /> <br /> Joël, tu me tentes. je ne connais pas « La psychanalyse du feu » de Bachelard.Je l'inscrit à la liste de mes découvertes à venir.
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J
La contemplation d'un feu avive l'imaginaire de la poétesse, si bien que l'ensemble du propos se pare d'une tonalité éminemment fantastique.<br /> <br /> <br /> <br /> Assimilé à une figure mythique (« cet ogre »), le feu est d'abord exalté par la lumière qu'il génère. C'est une clarté qui s'auto-alimente par un processus de prédation (personnification : « mâchouille », métaphore : « les os secs de l'hiver », participe passé : « rongée », participe présent : « éclatant sous la dent », termes à caractère mélioratif : « festin », « fumet »). Cependant, contrairement à l'incendie qui dévore, ravage, détruit progressivement des territoires entiers, ce qui « fascine le voyeur » ici, c'est bien le caractère fermé, circonscrit de la perspective (cheminée, poêle ou insert) qui met en évidence l'aspect apaisé, domestiqué, maîtrisé du rapport au feu. Les connotations qui y sont implicitement associées sont d'ailleurs bienveillantes (adjectifs qualificatifs : « débonnaires », « innocent », « généreux », animalisation renvoyant à l'image sereine du chat : « ronronnement sourd »). Le feu apparaît au lecteur comme la résultante d'un combat épique, héroïque, symbolique entre clarté salutaire et obscurité menaçante, comme le manifeste le jeu antithétique («rongée... la nuit » / « dent d'un soleil »).<br /> <br /> <br /> <br /> Une fois cette première approche dépassée, le feu est perçu, appréhendé, reçu comme source de chaleur. Sa proximité favorise une sensation d'enveloppement du sujet, comme dans une sorte de matrice, d'espace protecteur comparable au ventre confortable d'une mère (participe passé : « blotti », expression : « la ronde chaleur », animalisation : « abrite sous son aile »).<br /> <br /> <br /> <br /> Un poème qui donne diablement envie de se replonger dans « La psychanalyse du feu » de Bachelard.<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ce partage !
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P
Je lis un travail de déconstruction du poème : un premiers vers en octosyllabe suivi d'alexandrins.<br /> <br /> Et je lis aussi un formidable travail de personnification par l'image, deux pierres essentielles au style de l'auteur, que l'on retrouve dans un autre texte, superbe : Le moulin du Boël.<br /> <br /> « L'âtre » est personnifié par la figure de l'ogre à l'appétit insatiable dont la gueule « mâchouille » les bûches sèches mises au sec l'an dernier pour chauffer la maison, bûches comparées à des os => ogre = cannibalisme.<br /> <br /> Ce regard, cette vision du bois brûlant dans la cheminée nous captive, comme le poste de télévision nous captive, et ronge la nuit, et passe le temps, sous les postillons, ces éclats rougeoyant qui craquant sautent et bondissent sous les crocs de la mâchoire de l'ogre, « sous la dent » de ce soleil qui réchauffe, et le sourire de chaleur qui réchauffe en pleine froidure est bien sûr innocent ; il ne nous veut que du bien, ce feu, cet « ogre ».<br /> <br /> Encore une fois, personnification par le verbe : « la nuit postillonne »<br /> <br /> La suite n'est que ce que devient le feu naissant, un «  ronronnement sourd » et encore une fois, personnification du son et de l'image du feu en action : « de la bête en éveil »<br /> <br /> Cette image, cette vision « fascine » le « voyeur » comme le veilleur assis dans son fauteuil devant le poste de télévision.<br /> <br /> Il – ce « voyeur » – ne semble pas vouloir, pouvoir, se détacher de cette vision, de ce programme, alors qu'« un festin au fumet généreux » lui chatouille les narines.<br /> <br /> « une ronde chaleur l’abrite sous son aile » et le retient scotché devant le poste de télévision, devant la cheminée, l'âtre, devant ce programme, cette vision de la vie qui se transforme. <br /> <br /> Merci pour cette lecture, et d'autres...
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C
y a encore une petite place dans cette " ronde chaleur " ? Cet ogre me tente bien !
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A
@ Sonia : Merci d'être venue te réchauffer à mes côtés. <br /> <br /> Je n'ai pas pu résister au "fumet généreux" de l'haleine de l'ogre qui me permettait de filer la métaphore à moindre frais mais le mieux est souvent l'ennemi du bien !
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