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La perluète
26 janvier 2018

Les étrennes du vent

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J’ai allumé un feu

pour que chante

le vent

 

Que les os de l’hiver

crépitent sous sa dent

qu’il oublie de se plaindre et cesse de mugir

aux quatre coins de l’ombre autour de ma maison !

 

Dans l’âtre cajolant la bûche

il postillonne

sifflote une romance à coups de langue rousse

pique dans ses cheveux des brins de doubles croches

tandis qu’elle blêmit sur son divan de braises

 

J’ai allumé un feu

pour que chante

l’hiver

 

Pelotonné sous l’œil complice des tisons

le vent s’est assoupi et la bûche alanguie

s’effondre en libérant un essaim qui pétille

 

Les tempêtes d’hier et celles de demain

s’obstinent à plomber nos ciels de leurs aigreurs

mais sur son lit de cendre

en douce compagnie

le vent

pour ses étrennes

s’est offert un foyer

où ronronner serein entre deux cris de rage

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Commentaires
J
La poétesse, qui tronque avec bonheur l'alexandrin et en modèle subtilement le souffle (allitérations : b/p, f/v, assonances : an), joue les entremetteuses. Elle l'avoue d'ailleurs de manière un peu voilée dès l'entête...<br /> <br /> <br /> <br /> "J’ai eu envie de demander au vent une petite trêve…"<br /> <br /> <br /> <br /> Aussi va-t-elle s'attacher à détourner, un moment ("pour ses étrennes", "entre deux cris de rage"), la colère obstinée de cet ogre inflexible...<br /> <br /> <br /> <br /> "qu’il oublie de se plaindre et cesse de mugir / aux quatre coins de l’ombre autour de ma maison !"<br /> <br /> <br /> <br /> Le subterfuge auquel la poétesse a recours (anaphore : "J’ai allumé un feu" x 2) intrigue d'abord le lecteur car le but poursuivi (gradation anaphorique : "pour que chante le vent", "pour que chante l’hiver") semble impossible à atteindre au regard des circonstances.<br /> <br /> <br /> <br /> Cependant, ce vent, passant des étendues inhospitalières et glacées du dehors à l'intimité chaleureuse, enveloppante d'une cheminée, s'adoucit, succombant peu à peu, à l'image d'un homme ébloui, au charme d'une ensorceleuse (cette bûche du vers 8 que l'on a pris soin de présenter à la flamme).<br /> <br /> <br /> <br /> La douce fête des sens peut alors se déployer (ouïe : "chante" x 2, "crépitent", "postillonne", "sifflote une romance", "des brins de doubles croches", "un essaim qui pétille", "ronronner", goût : "sous sa dent", "à coups de langue rousse", toucher : "pique dans ses cheveux", "cajolant", "Pelotonné"). La dévoration voluptueuse de la bûche (double sens du mot "foyer", personnifications : "elle blêmit", "alanguie", effet de gradation des métaphores : "sur son divan de braises", "sur son lit de cendre") en signera l'apothéose, réduisant même un instant au silence l'hôte assagi ("le vent s'est assoupi").<br /> <br /> <br /> <br /> Merci pour ce partage !
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C
Petite cheminée, où tous les incendies du monde se changent en jardin, que nous t'aimons !<br /> <br /> Ton poème est superbe.
Répondre
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